Colette est l’un des plus grands écrivains français. Un de ceux qui ont porté la langue française à un point de perfection rarement égalé. Elle fut également une femme parmi les plus libres de son temps, une source d’inspiration pour des générations de lecteurs et de lectrices, une pionnière et un exemple dans l’émancipation et la libération de la femme au XXe siècle.
C’est dans la maison natale de Saint-Sauveur-en-Puisaye, entre ses murs, dans ses jardins, que Gabrielle Colette a acquis, auprès de sa mère, Sido, sa connaissance des plantes et des bêtes, l’attention aiguë à tout ce qui veut vivre, l’amour de la liberté et cet art de percevoir le monde à travers tous les sens qui deviendront les marques d’un style unique dans toute l’histoire de la littérature.
Mieux qu’une simple maison d’écrivain, la maison natale de Colette est le seuil de sa création littéraire.
Venez découvrir ou redécouvrir la vie et l’oeuvre de celle qui, toute sa vie, resta fidèle à un pays, la Puisaye, et à une région, la Bourgogne !
SIDONIE GABRIELLE COLETTE
Colette est née à Saint-Sauveur-en-Puisaye, petite commune de l’Yonne, le 28 janvier 1873. Elle est la dernière née des quatre enfants de Sidonie Landoy, née à Paris, ayant vécu à Bruxelles et mariée en 1857 à Jules Robineau-Duclos, riche propriétaire terrien de Saint-Sauveur dont elle eut deux enfants : Juliette en 1860 et Achille en 1863. Si ce mariage de raison avait apporté à Sido le confort matériel, il ne lui donna pas le bonheur. Jules Robineau-Duclos était un ivrogne aux fréquents accès de violence. Il mourut en 1865. Onze mois plus tard, Sido épousa en seconde noces le capitaine Jules Colette. Lui aussi est un déraciné, un méridional originaire de Toulon, dont les rêves de gloire avaient été brisés à la bataille de Melegnano. Zouave, il y perdit une jambe et obtint en compensation en 1860 le poste de percepteur à Saint-Sauveur-en-Puisaye. Dans le bourg où tout se savait, on jasa, car Sido n’aurait pas attendu la mort de son premier mari pour entretenir une liaison avec le Capitaine… Qu’importe les ragots ! Sido n’en a cure. Le Capitaine et elle formeront à jamais un couple heureux. Un fils, Léo, naît en 1866, puis une fille, sept ans plus tard, le 28 janvier 1873, que l’on prénomme Gabrielle, Sidonie-Gabrielle Colette : « notre » Colette.
UNE GRANDE MAISON BOURGEOISE
Avec son toit d’ardoise – comme le château de Saint-Sauveur – et non de tuiles, la grande maison des Colette se distingue des autres maisons du village. Vaste, coiffée d’un grenier avec des communs et des caves, elle compte 13 pièces. Le Capitaine y exercera un temps son rôle de percepteur dans ce qui était la salle à manger. L’aménagement est celui d’une maison de bourgeois cultivés : un vestibule au décor de fausses pierres de taille, au sol de dallage à cabochons ; des murs recouverts de papier-peint au-dessus de boiseries basses, des cheminées de marbre, des plinthes peintes en faux marbres, des parquets de chêne, une bibliothèque richement pourvue. Colette évoquera avec beaucoup de nostalgie le décor de son enfance. Mieux, elle en fera un personnage principal de son oeuvre.
UN PARADIS BRUTALEMENT PERDU
Au 8 rue de l’Hospice, Colette passe les dix-huit premières années de sa vie. Ce paradis de l’enfance, Colette va devoir le quitter à jamais en 1891, en raison des difficultés financières de la famille. En 1884, le mariage de Juliette Robineau-Duclos (sa demi-sœur aînée) avec le docteur Roché, sonne le début des ennuis. Juliette réclame le partage des biens de la succession Robineau-Duclos, mais cet argent, dépensé ou mal géré, ne peut lui être versé qu’au prix de ventes de terres et d’emprunts qui bientôt conduisent à la ruine de la famille Colette. Endettés, ayant vendu peu à peu les terres héritées par Sido, et ne disposant que de la maigre pension du Capitaine (ce dernier ayant abandonné son poste de percepteur pour se lancer sans succès dans la politique), ils quittent Saint-Sauveur, un an après avoir vendu une partie des meubles et des livres de la bibliothèque du Capitaine. Même si Colette se montre, plus tard, prompte à évoquer ses souvenirs d’enfance, elle n’évoquera jamais cet épisode de sa vie.
Ruinés, déclassés, les Colette s’installent en 1891 à Châtillon-Coligny, dans le Loiret, à 40 km de Saint-Sauveur, là où Achille, le fils aîné, est désormais médecin. Mais quel avenir pour Colette, jeune fille, belle, intelligente, mais sans dot ? Henry Gauthier-Villars, alias Willy, journaliste très en vue, critique musical redouté et écrivain par procuration (puisqu’il signe des livres écrits par d’autres), sera sa planche de salut. Au mois de mai 1893 Gabrielle Colette épouse Willy et quitte sa famille pour aller habiter Paris.
UN PERSONNAGE LITTERAIRE A PART ENTIERE
Devenue écrivain(e) sans l’avoir voulu – c’est du moins ce qu’elle a prétendu -, Colette fit de sa maison et de son pays natal un thème récurrent de son oeuvre. De son premier roman, Claudine à l’école, paru en 1900, à Ces dames anciennes, le dernier texte publié, en 1954, année de sa mort, en passant par La Maison de Claudine (1922) et Sido (1930) la maison de Saint-Sauveur-en-Puisaye est devenue un véritable rouage de la création littéraire. Pas ou peu d’équivalent dans l’histoire de la littérature française à cet écrivain qui a consacré autant de pages, autant d’énergie créatrice à recomposer par l’imagination un lieu de vie. La couleur et le motif d’un papier peint, le détail d’une gravure, la forme d’un objet, pièce après pièce, jardin après jardin, Colette aura pendant près d’un demi-siècle cherché à recréer par l’écriture le paradis qu’on lui avait volé à l’âge de dix-huit ans.
MAISON ET JARDINS REVIVENT
En 2016, cinq ans après son rachat par l’Association « La Maison de Colette » et à l’issue d’un lourd chantier de réhabilitation et de restitution, la demeure natale de l’écrivaine, à Saint-Sauveur-en-Puisaye dans l’Yonne, a ouvert ses portes au public. « La grande maison grave et revêche » où Colette passa les 18 premières années de sa vie, et qu’elle retrouve à l’âge de 50 ans, n’est revêche qu’en apparence.
Sous ses allures bourgeoises, elle est vibrante des moments heureux de l’enfance et de l’adolescence de Colette. C’est un cocon si plein de sensations que Colette n’en a jamais fini de l’évoquer par pans, par touches, recomposant au fil de son œuvre le cadre bienveillant du paradis de sa jeunesse.
Une maison d’écrivain, pas un musée : aujourd’hui le public est invité dans une maison bourgeoise de la seconde moitié du XIXe siècle, comme si ses occupants y vivaient toujours, sans barrière ni dispositif muséographique contemporain.
La Maison de Colette se visite comme on tourne les pages d’un livre. Une « maison-livre » donc pour reprendre l’expression du journaliste et romancier Jérôme Garcin et qui garde encore intact sa poésie et sa force d’inspiration.
« Un lieu magique. Une prévenance historique admirable. L’argent des donateurs a été employé d’une manière absolument magnifique, tout dans la précision. Je suis impressionné et enthousiaste. C’est formidable. » (Bernard Pivot, L’Yonne républicaine, 21 mai 2016)
« Impressionnant de vérité. » (TF1, JT 13h)
« Une rénovation exceptionnelle. Un chantier marqué par l’excellence. » (Sophie Giagnoni, Art et Décoration)
« Véritable personnage des romans de Colette, la demeure de son enfance à Saint-Sauveur-en-Puisaye ressurgit inchangée sous nos yeux émerveillés grâce à la foi militante d’une poignée de passionnés. L’on ne sait ce qu’il faut admirer le plus. Le charme renaissant de cette demeure de la moyenne bourgeoisie de la fin du XIXe siècle ? Ou la passion, la foi, la persévérance, le bon goût, la science et la délicatesse de ceux qui ont pris en main les destinées de la Maison de Colette et de ceux qui ont œuvré à sa restauration scrupuleuse en recomposant cet univers provincial si paisible, si frais, si modeste, mais aussi infiniment attachant ? » (Raphaël de Gubernatis, L’Obs)
« Cette maison abrite un pan majuscule du patrimoine littéraire français et il a fallu six ans de combat – le mot n’est pas forcé -, pour que l’association La Maison de Colette la ramène à la vie. Pour de vrai. Sans l’écho glacial des maisons musées qu’on visite en chuchotant. Non, une maison à vivre, une maison où l’on cause, on pense, on apprend. Hier, la porte nous a été ouverte. Et promis, Colette était là. Rien n’a changé. « J’appartiens à un pays que j’ai quitté », écrivait-elle. Elle est revenue. Chez elle. A la maison. Il était temps. » (Stéphane Vergeade, L’Yonne républicaine)